Frontière*

L’essence même de la frontière est de réunir de manière indissociable deux notions généralement opposées : la séparation et le passage. La frontière est donc en quelque sorte un concept « dialectique » : amputée de l’un de ses termes, elle dégénère. Une frontière que l’on ne passe pas s’appelle un mur, frontière dégénérée. On comprend bien ce que veut dire « mur de la honte », tandis que « frontière de la honte » n’a pas de sens. Or, depuis la chute du mur de Berlin et l’abolition de tant de frontières, en Europe notamment, des murs s’érigent sur tous les continents et jusqu’au cœur des villes. Mais un mur peut regagner un peu de la dignité attachée à la frontière lorsqu’il est percé d’une porte que l’on peut ouvrir ou fermer. A contrario, abolir les frontières « pour permettre la rencontre et l’échange de toutes nos différences » conduit à une pure aporie : les « différences » ne sauraient en effet naître et se perpétuer qu’à l’abri d’une frontière concrète ou abstraite et leur rencontre la requiert logiquement.

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