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Eloge presque inconditionnel des séries télé britanniques

… et pourquoi les séries françaises sont nulles à ce point ?

Paul Soriano

4 avril 2011, modifié le 29 juin 2024

Adepte des séries télé policières britanniques, y compris du fantastique, dans tous les sens du terme, MI-5 (le service, la série) on est d’abord frappé par la qualité de ces productions de pur divertissement. Surtout si on les compare à nos misérables équivalents français.

Qualité du produit : scénario, acteurs, dialogues (VOST indispensable), travail de l’image et des séquences et autres trucs et truquages, malgré l’accumulation des « routines » qui peut agacer, notamment dans MI-5 où elles sont particulièrement agressives. On n’y fait certes pas dans la dentelle mais le tissu est solide. Idem pour Crimes sur la Tamise (Trial and Retribution). Plus sobres, les Frost (A Touch of Frost),
Morse (Inspector Morse), Meurtres à l’anglaise (The Inspector Lynley Mysteries),
Suspect n°1 (Prime Suspect), où sévit l’admirable Helen Mirren (née Yelena Vasilievna Mironova) presque aussi crédible dans le rôle de Jane Tennison, une inspectrice pocharde et dépressive, que dans celui de Queen (Elizabeth II). Même l’insipide Barnaby (Midsomer Murders),
qu’on regarde pour les paysages, ou les très inégales
Miss Marple vous remboursent largement la redevance et les abonnements aux chaînes.

Mais le plus admirable, c’est encore le réalisme des personnages, évidemment servi par le talent des acteurs, aussi abondant et naturel que le thé, le pure malt et les pintes de bière. Même les espions robocopés de MI-5 ont leurs faiblesses et jamais les nanas ne ressemblent à des mannequins improbablement égarés dans une rixe urbaine, comme c’est trop souvent le cas dans les séries américaines. Pour être tout à fait franc on soupçonne que les injonctions du politiquement/sexuellement correct dissimulent sournoisement une atavique misogynie : la densité d’emmerdeuses, bien supérieure à celle que nous connaissons dans la vraie vie, paraît tout de même un peu suspecte. Nous y reviendrons ici même un peu plus tard (Des mecs très cools et des nanas très chiantes).

Quant à Hercule Poirot, regardé en VOST, il ajoute à la qualité générale le plaisir interdit par le doublage d’entendre un acteur britannique (David Suchet) s’exprimer avec un accent français d’autant plus approximatif qu’il est présumé belge. Ces foutus anglais, BBC ou productions privées, sont tellement doués qu’ils parviennent à rendre plaisantes leurs rares faiblesses.

Côté France l’indigence est tout aussi remarquable, à commencer par le manque de professionnalisme. Les acteurs en particulier ont dû apprendre le métier par correspondance pendant une grève de la Poste. Scénarios débiles et scènes d’action calibrées pour la cour de maternelle parachèvent si l’on peut dire la nullité du genre. Si l’on considère que Navarro est le moins mauvais, on voit où se situe la moyenne. Quant au message politique il est tellement téléphoné et insupportablement niais qu’il doit expliquer, par réaction, une bonne partie de la montée du Front national. Bref : la production hexagonale la plus courante ressemble à un mauvais sitcom doublé en français par les Inconnus, à ceci près que le comique y est involontaire.

Exception peut-être, à confirmer (Braquo ?) : les productions où intervient Oliver Marchal et dont les codes, du reste, se rapprochent du modèle anglo-saxon.

Et vu que le cinéma français est trop souvent logé à la même enseigne (avec tout de même ici d’assez nombreuses exceptions) on peut s’interroger sur les vertus de ce modèle français que le monde ne nous envie pas.
Comme il n’y a aucune raison de penser que les Français sont congénitalement dépourvus de talent, il faut sans aucun doute incriminer un mode de sélection et de financement indifférent aux goûts du public et ouvert à tous les copinages, où le seul talent décisif est celui de la magouille qui s’exerce en toute opacité dans les arcanes du paysage audiovisuel français.


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