« Et si je me trompe, je sais que vous me corrigerez » (Jean-Paul II)

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50. Homo Ludens

Narcisse

La fin de l’individu

Paul Soriano, 15 juillet 2020

Modifié le : 3 août 2021

Individualisme : instrument d’une expérience tentée par Dieu (ou l’évolution) pour voir ce qu’une telle doctrine introduite dans la psyché d’une espèce pourrait bien produire. Apparemment, Dieu a vu et l’expérience est achevée…

En dépit du narcissisme ambiant, l’usage des pronoms « je » et « moi » fait souvent mauvais genre aujourd’hui : les gens bien élevés et même les ados (un baromètre en la matière) ne disent plus « je me sens angoissé », mais « c’est l’angoisse ». Et encore : « c’est la merde » (pour « je suis dans… »), « c’est le pied », « ça déconne », etc.

À vrai dire, personne, même et surtout en Occident, n’a jamais vraiment cru que l’individu est la valeur suprême : l’Amérique est paraît-il une société fondée sur le mythe de l’individu, mais que vaut au juste pour un général de l’US Air Force la vie d’un individu japonais ou irakien ?

Et du reste, jamais peut-être dans l’histoire de l’humanité la vie et l’avis de l’individu n’ont pesé aussi peu dans la marche de nos grandes machines sociales, l’économie, la guerre ou la politique…

L’œuvre de Proust, considérée à tort comme une manifestation clinique de narcissisme, établit l’acte de décès du moi en littérature. Le moi y est enfin dégradé au rang d’instrument affecté à l’exploration de l’Être. Le « je » de Proust est déjà un atman qui s’effiloche dans le brahman : la Recherche pourrait s’intituler Tat Tvam Asi (« tu es ceci ») ; ou encore L’Être et le temps, plus banal. Au passage, il faut rendre hommage au Nouveau roman : peut-être pas de la bonne littérature mais assurément de l’excellente philosophie…


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